Quand l’Hindu Kush se réveille : plus de soixante secousses en moins de 3 mois

Lundi 18 janvier 2016

gol shafiq

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Le 26 octobre 2015, un fort séisme de magnitude 7.5 secouait l’Hindu Kush et était ressenti en Ouzbékistan, au Tadjikistan, en Afghanistan et en Inde, occasionnant près de 400 morts au Pakistan et en Afghanistan.

Depuis, selon les enregistrements de CSEM/EMSC, 58 séismes de magnitude significative, c’est-à-dire supérieure à 4, se sont succédé, affolant les habitants de Tashkent à Islamabad en passant par Dushanbe, Peshawar et Kaboul :

26/10/15 : magnitude 7.5, profondeur 207 km

26/10/15 : magnitude 4.7, profondeur 190 km

26/10/15 : magnitude 4.8, profondeur 192 km

26/10/15 : magnitude 4.0, profondeur 217 km

26/10/15 : magnitude 4.6, profondeur 192 km

26/10/15 : magnitude 4.1, profondeur 206 km

26/10/15 : magnitude 4.2, profondeur 213 km

26/10/15 : magnitude 4.5, profondeur 200 km

27/10/15 : magnitude 3.8, profondeur 191 km

27/10/15 : magnitude 4.1, profondeur 209 km

27/10/15 : magnitude 4.0, profondeur 210 km

27/10/15 : magnitude 4.2, profondeur 200 km

27/10/15 : magnitude 4.0, profondeur 196 km

27/10/15 : magnitude 4.0, profondeur 204 km

27/10/15 : magnitude 4.0, profondeur 192 km

27/10/15 : magnitude 4.7, profondeur 200 km

27/10/15 : magnitude 4.3, profondeur 201 km

28/10/15 : magnitude 4.1, profondeur 211 km

28/10/15 : magnitude 4.0, profondeur 215 km

28/10/15 : magnitude 4.5, profondeur 210 km

28/10/15 : magnitude 4.4, profondeur 196 km

28/10/15 : magnitude 4.2, profondeur 205 km

29/10/15 : magnitude 4.3, profondeur 195 km

01/01/15 : magnitude 4.2, profondeur 200 km

01/01/15 : magnitude 4.7, profondeur 204 km

01/11/15 : magnitude 4.0, profondeur 206 km

05/11/15 : magnitude 4.0, profondeur 196 km

06/11/15 : magnitude 4.2, profondeur 205 km

09/11/15 : magnitude 4.6, profondeur 183 km

15/11/15 : magnitude 4.6, profondeur 212 km

17/11/15 : magnitude 4.1, profondeur 220 km

18/11/15 : magnitude 4.3, profondeur 187 km

22/11/15 : magnitude 5.8, profondeur 95 km

23/11/15 : magnitude 4.3, profondeur 112 km

24/11/15 : magnitude 4.1, profondeur 196 km

25/11/15 : magnitude 4.0, profondeur 170 km

30/11/12 : magnitude 4.3, profondeur 120 km

02/12/15 : magnitude 4.7, profondeur 40 km

07/12/15 : magnitude 4.5, profondeur 110 km

11/12/15 : magnitude 4.1, profondeur 198 km

14/12/15 : magnitude 4.4, profondeur 209 km

14/12/15 : magnitude 4.3, profondeur 136 km

15/12/15 : magnitude 4.1, profondeur 86 km

25/12/15 : magnitude 6.3, profondeur 212 km

28/12/15 : magnitude 4.0, profondeur 192 km

28/12/15 : magnitude 4.1, profondeur 101 km

29/12/15 : magnitude 4.0, profondeur 47 km

29/12/15 : magnitude 4.4, profondeur 204 km

01/01/16 : magnitude 4.5, profondeur 205 km

02/01/16 : magnitude 5.2, profondeur 178 km

07/01/16 : magnitude 4.3, profondeur 191 km

08/01/16 : magnitude 5.1, profondeur 212 km

13/01/16 : magnitude 5.7, profondeur 237 km

13/01/16 : magnitude 4.7, profondeur 80 km

14/01/16 : magnitude 4.0, profondeur 195 km

15/01/16 : magnitude 4.2, profondeur 200 km

16/01/16 : magnitude 4.4, profondeur 200 km

17/01/16 : magnitude 4.6, profondeur 80 km

18/01/16 : magnitude 4.9, profondeur 80 km

Pour comprendre ce qui se passe : Séisme en Afghanistan : quand le continent indien fonce vers l’Eurasie.

La question est : ces secousses qui se succèdent à un rythme soutenu augurent-elles d’un méga-séisme ?

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Deux Ouzbeks et un Kazakh arrêtés à New York #Daesh

Mercredi 26 février 2015

Akhror Saidakhmatov, 19 ans, et Abdurasul Juraboev, 24 ans (à droite)

Akhror Saidakhmatov, 19 ans, et Abdurasul Juraboev, 24 ans (à droite)

Ils ont été trop bavards… Akhror Saidakhmatov, Kazakh de 19 ans, a été arrêté à l’aéroport de New York alors qu’il embarquait pour un vol vers Istanbul pour rejoindre l’organisation Daesh. Quant à Abdurasul Juraboev, Ouzbek de 24 ans, il venait d’acheter son billet et s’apprêtait à partir au mois de mars. C’est Abror Habibov, 30 ans, Ouzbek, qui les avait aidés à financer l’opération. Il a été arrêté en Floride.

Leur mission, s’il ne réussissaient pas à quitter les Etats-Unis, détourner un avion, exécuter des policiers, et commettre d’autres actes terroristes. Habibov, venu avec un visa tourisme aux Etats-Unis, n’en était pas reparti et avait ouvert des petits commerces (réparation de téléphones, ustensiles de cuisine). Les trois avaient l’air « tout à fait normaux et inoffensifs » selon l’agent qui leur a vendu les billets d’avion.

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L’ex-gendre retrouvé mort dans sa cellule en Autriche. Kazakhstan

Mardi 24 février 2015

Rakhat Aliyev, l'ex gendre détesté de son beau-père, Nazarbayev, président du Kazakhstan

Rakhat Aliyev, l’ex gendre détesté de son beau-père, Nazarbayev, président du Kazakhstan

C’était l’homme à abattre, le gendre détesté à écarter. Son beau-père, Nursultan Nazarbayev, Président du Kazakhstan, l’avait nommé ambassadeur du Kazakhstan à Vienne pour l’éloigner. Puis il avait contraint sa fille Dariga à divorcer.

Traqué, menacé d’extradition vers le Kazakhstan, Rakhat Aliyev, 52 ans, se  savait en danger, même en Autriche (il s’était installé à Malte), et avait fini par se rendre en juin aux autorités autrichiennes, car, semble-t-il, il se serait senti plus en sécurité en prison en Autriche qu’en liberté. Il était accusé du meurtre de deux dirigeants de banques au Kazakhstan. Mais aussi de beaucoup d’autres choses et n’avait beaucoup d’ennemis, voir ce site par exemple : Rakhat Aliyev Mafia organized crime group.  

Aujourd’hui on l’a retrouvé pendu dans sa cellule. Celui qui fut en passe de devenir l’homme le plus puissant du Kazakhastan aurait été victime du chantage de deux codétenus contre lesquels, justement, il devait témoigner quelques heures après qu’on l’ait retrouvé mort. Ses avocats ne croient pas au suicide.

En savoir plus :

http://www.theguardian.com/world/2015/feb/24/kazakh-leaders-ex-son-in-law-rakhat-aliyev-found-dead-in-austrian-jail

http://www.rferl.org/content/kazakhstan-rakhat-aliev-timeline/26867151.html

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Retour en Asie centrale

Kirghizistan, Tien Shan. © Sylvie Lasserre

Longtemps sans vous donner de nouvelles.  Eh oui… Trois ans que je n’étais retournée en Asie centrale ! Je me suis mariée avec un Pachtoune et vis au Pakistan depuis trois ans. Enfin… je partage comme je le peux mon temps entre le Pakistan, la Turquie (où se trouve ma maison) et la France.

Kirghizistan. L’auteur avec la famille du marié.

Mais enfin, au mois d’octobre, je suis retournée vers mes chères contrées ! D’abord au Kirghizistan à l’occasion du mariage du frère d’une amie, puis en Ouzbékistan.

Quel plaisir, mais aussi que de changements en trois ans, surtout dans les villes. Elles sont de plus en plus colonisées par les voitures. Les enfants sont connectés à Facebook en permanence. A Tashkent, les maisonnettes des quartiers tranquilles font lentement place à d’énormes édifices kitch, maisons individuelles de plus de mille mètres carrés, qui peu à peu grignotent la verdure de la ville et entament le charme si désuet de la ville. Les « new-Ouzbeks », comme les « new-Tadjiks », comme les « new-Kirghiz », aiment étaler leur richesse. Le communisme ne sera bientôt plus qu’un vague souvenir, que la nouvelle génération n’aura jamais connu.

Kirghizistan, Tien Shan. © Sylvie Lasserre

L’économie de marché, qui fut si difficile aux débuts, juste après la chute de l’empire soviétique, commence à prendre ses marques. De nouveaux commerces, flambant neufs, ont remplacé les vieilles échoppes. Un peu partout l’on refait les routes. Peu à peu l’on se relève du choc de la fin de l’URSS.

Tashkent, Ouzbékistan. © Sylvie Lasserre

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L’incroyable odyssée de Tölegen le Kazakh : de Chine en Turquie, quatorze années.

tolegen.1223809647.jpg

« Sur quarante nous ne sommes restés que deux ! Nous avons parcouru entre cinquante et soixante mille kilomètres à cheval, en chameau, à pieds, en bateau… » L’œil rusé et la langue bien pendue, Tölegen est presque une légende à lui tout seul… Une épopée de quatorze années, d’Urumqi (Turkestan oriental, Chine) à Istanbul.

C’est dans l’avion pour Istanbul que j’ai fait la connaissance de son petit-fils. Kadir, un Français d’origine turque vivant en banlieue parisienne, était assis à ma droite. Son air très centrasiatique avait excité ma curiosité.  » Vous êtes Turc ?  »  » Oui mais d’origine kazakhe. » Sa réponse avait devancé mes questions. Enfin je tenais un Turc d’Asie centrale !

Pas si vite. En fait son origine était récente :  » C’est mon grand-père qui est Kazakh. Ma mère elle est née en Turquie. Et moi je suis né en France.  » Non il ne remontait pas aux descendants des hordes de Genghis Khan. Tant pis…

A vrai dire Kadir ne savait pas trop. Il me disait :  » Ouais mon grand-père il est trop ! C’est quelqu’un d’important. C’est un personnage mon grand-père ! Sa vie elle est incroyable ! Il est né en Chine. Il te raconterait mieux lui-même !  » Je peux le rencontrer ?  » Ouais pas de problème ! Il est cool mon grand-père ! « 

Voilà comment j’ai rencontré Tölegen. Il vit à Güneşli – l’ensoleillée ? -, le quartier kazakh d’Istanbul.  » C’est lui qui a créé le quartier ! me raconte Kadir. C’est grâce à lui que les Kazakhs ont pu s’installer ici, c’est lui qui leur a prêté de l’argent. Ici tout le monde l’adore, tout le monde le respecte ! « 

tolegen-2.1224089795.jpgRendez-vous est pris. Deux jours plus tard, Kadir m’attend devant le commissariat de Güneşli puis me mène à l’immeuble du fameux grand-père où chaque membre de la famille possède un appartement. Kadir, son frère Kaan, et ses parents, y passent tous leurs étés.

Le grand-père me reçoit dans un immense salon, vide presque, à la mode türque. Sur le pourtour, des canapés. C’est la pièce pour les hôtes, comme on en trouve dans chaque maison en Asie centrale. Tölegen, soixante-dix huit ans, a les yeux malicieux et rieurs. D’emblée il m’est sympathique. Il m’invite à m’asseoir.

Et c’est parti pour l’histoire. Il raconte avec grand plaisir, visiblement pour la millième fois.

 » Je suis né en 1930 ! Je m’appelle Tölegen. On a quitté la Chine en 1934, j’avais quatre ans ! J’étais de la tribu des  » Molkos  » (?) Beş yüz ! Beş yüz ! Nous étions cinq cent dans notre campement. Nous sommes partis à cheval, avec les moutons… Nous vivions sous des tentes, des yourtes. Elles étaient faites de peau de mouton et de chèvre, cela tenait chaud. Les Chinois nous ont pourchassés parce que nous étions musulmans. Et pourquoi vous n’êtes pas allés au Kazakhstan ? A cette époque, il y avait les communistes ! Il ne cesse de répéter : Tchang Kaï-Chek ! Tchang Kaï-Chek ! J’imagine que leur fuite est liée à la grande marche de 1934, la fuite du communisme.

Puis le Tibet, le Népal, l’Inde, le Pakistan, l’Iraq et enfin la Turquie… Au Tibet ce fut effroyable. C’était en 1935-36. Les gens mourraient mourraient. Nous nous faisions attaquer car nous avions des moutons, des chèvres, des chevaux… Il faisait si froid. C’était très haut. Nous n’avions rien à manger. Nous manquions d’oxygène. Il y en avait qui gonflaient, gonflaient, puis mourraient. Il faisait tellement froid sur le cheval que certains ont perdu leurs jambes. Elles se cassaient – il montre le niveau des genoux – et elles tombaient. On ne mangeait rien, que du bouillon de mouton.

Après des Anglais sont venus, mais les Chinois leur ont dit :  » Il y a des Kazakhs, des Barbares. » On s’est battus contre les Anglais, il y a eu trente morts des deux côtés. Nous étions sur des chameaux, une balle m’a traversé – Il me montre sa cicatrice. Puis nous sommes redescendus plus bas. Il y avait des champs. Et là des soldats de l’armée pakistanaise sont venus. Ils nous ont soignés, ils nous ont lavés. Ils nous demandaient d’où nous venions, ils ne comprenaient pas qui nous étions parce que nous étions blancs. Ma mère est morte. Mon frère est mort. Mon grand-père, ma grand-mère… Sur quarante nous sommes restés deux, mon père et moi. Ils nous ont transportés sur des chariots. Après on est arrivés au Népal. Là, nous étions si pauvres que nous nous sommes habillés avec deux feuilles d’arbre. Des grandes feuilles. Il ne restait plus personne. Quand il pleuvait, les sangsues tombaient des arbres.

Après les Anglais ont pris nos empreintes, la couleur des yeux et tout, et ils nous ont donné un papier jaune en nous disant qu’on pouvait aller partout, dans le monde entier, gratuitement ! C’était en 1948. On pouvait aller aux Etats-Unis, mais comme on était musulmans, on est restés.

Nous sommes restés deux ans au Népal. Népal, Bopal, Agra, Delhi, Rawalpindi, Islamabad… A Rawalpindi, j’avais douze ans. Là des gens ont demandé si quelqu’un voulait combattre à la lutte. Mon père a dit oui moi je veux me battre ! Mon père il aimait bien se battre. Dès qu’il y avait un combat il y allait. Et mon père a gagné. Alors les hindous lui ont mis une fleur, ils ont fait trois jours de fête parce que mon père avait gagné. Ils l’ont emmené dans un endroit luxueux. Moi j’ai suivi mon père. On a mangé, mangé ! Ils nous ont donné de l’argent. Puis nous sommes allés à Delhi.

On est restés deux ans à Delhi. Je suis allé à l’école. Ensuite on est partis au Pakistan. Je suis allé quatre ans à l’école au Pakistan. Puis la Croix rouge est venue. Là j’avais seize ans. Ils nous donnaient des vêtements et on les vendait. Puis avec mon père on a fabriqué des chapeaux pakistanais en astrakan. On avait acheté une machine et pendant cinq ans on a fabriqué des chapeaux. On a gagné beaucoup d’argent ! On les vendait moins cher que les Pakistanais. Ensuite on a vendu de l’huile de moteur. C’était en 1952.

C’est Adnan Menderes qui nous a fait venir en Turquie. Il a dit venez par vos propres moyens jusqu’à la frontière, ensuite je vous prendrai en charge. Mais avant qu’on parte, les Pakistanais nous ont demandé de payer des taxes énormes, parce qu’on avait gagné de l’argent. Alors on a tout converti en marchandises pour ne pas donner d’argent. On a transporté ces marchandises jusqu’à Bagdad, et on les a vendues là-bas. Un mois et demi de bateau de Karachi jusqu’à Bagdad.

Avant d’entrer en Turquie, ils ont désinfecté nos marchandises. Ils ont aspergé de produit nos cuirs, nos vêtements… Tout a pourri ! Puis ils nous ont mis dans des camps en Turquie, en quarantaine, et nous on sautait le mur le soir pour aller travailler. Puis l’Etat nous a offert des terrains. J’avais dix-huit ans en arrivant à Istanbul.

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Ensuite, j’ai fait mon service militaire puis, du business ! J’ai eu l’idée de fabriquer des sacs en plastique. J’ai acheté une grosse machine. J’étais le premier à faire ça. J’ai gagné énormément d’argent. Pendant ce temps les autres Kazakhs faisaient du cuir. Puis j’ai acheté un terrain ici en 1970, un ancien champ de melons. Je revendais des parcelles aux Kazakhs. En 1973, tout était construit. Petit à petit j’ai permis à tout le monde de s’installer. Je leur faisais crédit. Ici, 400 familles kazakhes ont pu s’installer grâce à moi.  »

Il me montre une photo de lui en compagnie du wali (le maire) d’Istanbul en train de lui remettre une carte d’Asie où est inscrit son parcours depuis la Chine jusqu’à Istanbul.

Aujourd’hui, Tölegen fait des affaires en Asie centrale. Kazakhstan, Ouzbékistan, Kirghizistan… Il s’est remarié à une Ouzbèke après la mort de sa femme.

L’entretien touche à sa fin. Tölegen a fait commander un repas chez le traiteur (sa femme ouzbèke étant absente). Son portable sonne. Il décroche. Kadir :  » T’as vu l’grand-père ! Il est trop ! « 

Oui il est trop…

PS: Quant au père de Tölegen, il a vécu jusqu’à cent dix ans. Une véritable force de la nature j’imagine. Il avait écrit son histoire mais les feuillets se sont perdus. Il n’en existe plus que quelques bribes, écrites en kazakh et en turc.

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Kazakhstan. Un cadavre de chien décapité en guise d’avertissement

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Une couronne mortuaire en cadeau pour la fête des femmes et une tête de chien décapité dans son jardin. Irina Petrushova, rédactrice en chef de Respublika, un journal d’opposition kazakhstanais dont le siège se trouve à Almaty, n’a pas baissé les bras pour autant.

Mais aujourd’hui elle est recherchée par Interpol kazakhstan et a dû s’exiler à Londres pour poursuivre sa mission ; son adjointe, Oxana Makushina, vit toujours à Almaty.

Rencontre :

Elles sont souriantes, simples, sans le moindre brin d’arrogance. Ces deux femmes rédactrices en chef d’un journal d’opposition au Kazakhstan, Respublika, poursuivent leur courageux combat depuis dix ans malgré les intimidations et les menaces.

oxanamakushina.1268427858.jpg« Nous sommes sur le marché des médias depuis dix ans et depuis dix ans nous faisons l’objet d’une attention soutenue de la part du gouvernement en place. Depuis dix ans nous subissons une alternance de périodes relativement calmes et de périodes de pressions très fortes de la part du gouvernement, durant lesquelles nous avons  dû affronter plusieurs procès.

Quand nous avons fondé notre journal, nous n’avons pu travailler qu’un an et demi comme un journal normal, avec des encarts publicitaires, etc. Ensuite la situation s’est dégradée.

La crise politique de la fin 2001 s’est soldée par la création du mouvement politique « Le Choix Démocratique du Kazakhstan », l’un des principaux partis d’opposition du Kazakhstan, qui regroupait en son sein toutes les forces d’opposition du Kazakhstan, et a vu adhérer non seulement la société civile mais aussi des hommes politiques, de grands hommes d’affaires, des banquiers…

Nous, en tant que journal indépendant et journalistes et personnes qui voulions améliorer la situation dans le pays, nous avons soutenu ce mouvement, nous en avons été le support d’information, et c’est ce qui nous a créé les premiers problèmes.

Par exemple durant les six premiers mois de 2002, nous avons reçu une visite de la police fiscale. Ils nous ont confisqué tous nos documents et ne nous les ont jamais rendus. Ils n’ont dressé aucune liste des pièces confisquées, ils sont venus, ils ont ramassé tous les documents, le matériel, et ils sont partis.

 

Au mois de mars 2002, les imprimeurs ont reçu l’ordre de ne plus nous imprimer.

 

Puis le Ministère de l’information a commencé à nous reprocher qu’il manquait des informations dans l’ours, que ce n’était pas présenté dans le bon ordre, ou que nos sources d’information ne sont pas fiables…

 

Ca n’a jamais été une cause de mise en examen mais ça a été un prétexte pour induire quelques poursuites à notre encontre. Et donc ils ont engagé ces poursuites judiciaires contre nous pour nous empêcher de rendre compte des procès engagés à l’encontre des dirigeants du mouvement politique que nous soutenions.

 

 

Toujours en 2002, pour nous faire encore plus peur, on a fait une pression psychologique sur nous. Notamment Irina, la rédactrice en chef, a reçu une couronne mortuaire à son domicile à son nom pour la journée internationale de la femme le 8 mars.

 

 

Ensuite au mois de mai 2002 sur les grilles qui protègent les fenêtres du siège du journal, pendant un week-end on a suspendu un cadavre de chien sans tête et la tête a été jetée dans le jardin de sa maison. Et le chien a été pendu le jour anniversaire de la création du journal.

Nous avons fondé le journal le 18 mai 2001, donc c’était le premier anniversaire. Une sorte de cadeau. Il y avait une lettre agrafée avec un tournevis planté dans le corps du chien et il y avait écrit sur la lettre : il n’y aura pas de second avertissement.

 

 

Nous avons signalé cela lors d’une conférence de presse et deux  jours plus tard notre rédaction aété incendiée. C’était un incendie criminel.

 

Vers cette date là, le tribunal a ordonné la fermeture du journal. Pour infractions administratives officiellement. Comme nous avions prévu cela, nous avions déjà enregistré d’autres journaux, sous d’autres titres, contenant le même mot. Mais pendant deux mois nous avons du être publiés sans licence, sans enregistrement officiel. Nous imprimions sur les grosses imprimantes de bureau. Et nous diffusions par le réseau des kiosques privés. Les kiosques d’Etat ne nous acceptaient pas.

 

 

Ce journal se evndait très bien dans les kiosques privés. Nous sommes un journal d’analyse économique et politique. A l’époque nous diffusions près de 15000 exemplaires (en 2002). Nous avons tout de suite orienté notre journal vers les élites cultivées, les fonctionnaires, et les hommes d’affaire de moyennes et grandes entreprises. C’est un peu l’équivalent du Financial Times pour les Britanniques, avec un peu plus de contenu politique.

 

Nous n’avons jamais modifié notre stratégie éditoriale. Au moment où nous avons commencé à paraître, le marché des médias était très limité au Kazakhstan. Il n’existait aucun journal d’analyse. Nous avons été les premiers c’est pour cela que nous avons gagné l’estime  des hommes influents du pays. Et c’est pour cela aussi que notre journal a toujours été surveillé de très près.

 

On essayait de nous éliminer non seulement parce que nous soutenions l’opposition, mais aussi parce que nous exercions une très grande influence sur les décideurs du pays à cette époque-là. Parce que nous nous sommes permis de critiquer le gouvernement, le cabinet du président et le parlement.

 

Depuis dix ans le slogan de notre journal c’est : « Pas tout le monde nous aime mais tout le monde nous lit. »

 

 

En réalité nous avons été confrontés aux premiers problèmes dès l’automne 2001. Le gendre du président, Rahat Aliev, a exigé que je lui remette le portefeuille de contrôle de mon journal. Il voulait prendre le contrôle de notre journal et exigeait que je lui remette (gratuitement) la majorité des parts. Parce que la famille du président voulait contrôler notre journal.

 

Ils voulaient que l’on écrive ce qu’ils voulaient que l’on écrive pour influencer la société civile. Et c’est quand j’ai refusé de le faire que nous avons commencé à avoir des soucis. Et à l’époque nous ne pouvions pas imaginer que l’on incendierait notre rédaction, que l’on suspendrait des chiens tués à nos fenêtres.

 

Mais j’avais appris que plusieurs procédures en justice avaient été entamées à mon encontre. Des personnes qui nous soutenaient au parlement ou parmi l’administration du président nous avaient dit en off qu’il fallait nous attendre à être fermés. Voilà pourquoi nous avions prévu d’autres solutions en enregistrant d’autres titres de journaux.

 

Nous avons été soutenues par des personnes influentes des régions différentes de notre pays. Et entre 2002, quand Respublika a été fermé, jusqu’à 2007, nous avons paru sous plusieurs titres différents, nous en changions régulièrement. Une fois on a même pu paraître sous un titre une seule fois. Un seul numéro. Tout de suite après on a été fermés. En 2004 nous avons à nouveau pu enregistrer une licence avec le mot respublika dans le titre, et cela a été possible parce que le ministre de l’information a changé et c’est un des opposants, bizarrement, qui a pris sa place. Et on en a profité pour enregistrer plusieurs licenses avec le mot république dans le titre. Parce qu’en général, enregistrer un journal chez nous est extrêmement difficile. Dès le mois de septembre 2004 nous avons recommencé à paraître avec le mot respublika dans le titre mais on nous fermait régulièrement également.

 

Le 11 septembre 2002 a été la dernière impression du journal au format journal normal. Ensuite nous imprimions nous-mêmes dans nos locaux sur nosimprimantes.

 

Et nous avons aussi commencé à paraître dès le 7 juin 2002 sous d’autres titres dont le premier de la liste : « l’économie, les finances, les marchés », et ces titres suivants pouvaient être à nouveau imprimés par des imprimeurs.

 

Mais tout le monde nous reconnaissait et les gens continuaient à demander dans les kiosques la Respublika. Car nous avons toujours essayé de conserver le même design reconnaissable, la même mise en page, la même présentation. Là par exemple, si vous remarquez, ce n’est pas la Respublika, c’est « La voix de la république » (elle me montre un exemplaire au format A3 agrafé).

 

 

En 2007 nous avons connu une période d’accalmie. Nous avons pu attirer à nouveau des entreprises publicitaires pour placer des encarts sur nos pages.

 

Actuellement, le plus gros problème que nous n’arrivons pas à résoudre c’est le problème des imprimeurs. Depuis le 18 septembre 2009, aucun imprimeur n’accepte de nous imprimer sous aucun titre. Cela fera six mois. Alors on reparaît sous le format A3 imprimé et agrafé à la main. C’est nous qui avons trouvé cette solution.

 

Un exemplaire coûte presque 50 tenge, un quart d’euros. Et on imprime 19000 exemplaires. Et le grand format juste avant la fermeture c’était 25000 exemplaires.

 

La semaine dernière nous avons eu une illustration flagrante du motif de refus des imprimeurs. Nous avons trouvé un imprimeur qui acceptait de nous imprimer en grand format dans la ville de Karaganda. Deux heures après le début de la vente du journal, le directeur a été appelé auprès des autorités locales et on lui a dit qu’ils avaient reçu un appel direct d’Astana lui ordonnant d’arrêter de prendre des commandes chez nous sous peine de perdre son business. Et bien évidemment il a refusé de nous imprimer à nouveau et nous avons dû recommencer à paraître avec nos tirages et nos agrafes.

 

 

Financièrement nous arrivons à tenir, non pas parce que nous sommes rentables, car nous avons perdu tous les contrats publicitaires, nous tenons grâce à des sponsors qui nous soutiennent. Ce sont des représentants de l’opposition, des représentants du monde des affaires.

 

Qui est derrière tout cela ?

Ce sont des personnes du comité de sécurité de l’Etat, nous le saovns de source sûre. Eux disent que ce sont des voyous…

C’est directement Nazarbaev qui est derrière ?

Nazarbaev ! Exact ! Oui !

Y a-t-il eu des tentatives d’atteinte à la vie des journalistes ?

Directement personne n’est jamais venu pour nous dire, nous vous tuerons si vous écrivez quelque chose dans ce journal. Mais les journalistes de la rédaction sont tout le temps suivis par des véhicules, des personnes… donc nous sommes obligés de recourir à des mesures de sécurité très poussées. Nos journalistes sont tous raccompagnés de la rédaction à leur domicile en voiture et sont ramassés tous les matins par les voitures qui les amènent directement à la rédaction. Nous essayons au maximum de limiter les risques de déplacement, d’éviter des provocations.

 

 

Tous les agissements envers notre rédaction, la version officielle est que ce sont des voyous qui s’amusent. Le chien a été suspendu par des voyous ! L’incendie de nos locaux c’étaient des voyous ! Donc nous protégeons notre équipe contre les voyous !

 

 

Oxana, vous vivez à Almaty, vous n’avez pas de problèmes ?

Les problèmes directs je n’en ai pas. Il y eu une période où l’on faisait des pressions sur ma famille, notamment mon mari on lui a dit directement : soit c’est ta femme qui travaille au journal, soit c’est toi qui perds ton poste. Et nous avons pu trouver un compromis et je ne signe pas de mon nom, j’écris mes articles sous un pseudonyme pour qu’il n’ait pas de soucis à son travail.

 

Irina, à quelle date avez-vous quitté Almaty ?

 

En 2002. Après la fin du premier procès et avant le début du deuxième procès. Parce que quand j’ai su que quoi que je dise l’issue serait la même, je serais emprisonnée… Actuellement je peux rentrer dans le pays. Mais si je rentre je ne le quitterai plus. Il y a même un certain danger : si je vais au Kirghizistan ou dans les pays voisins je serai aussi arrêtée car je suis enregistrée par Interpol kazakh comme personne recherchée, tous les pays non démocratiques peuvent m’arrêter.

 

 

Propos recueillis en février 2010, le Kazakhstan préside l’OSCE en 2010…

 

 

« Les bardes d’Asie centrale » ce soir au Théâtre de la Ville à Paris

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J’ai eu la joie d’en avoir un avant-goût hier soir à la maison d’Europe et d’Orient avec Uljan Bajbusinova et Ardak Issataeva, les deux bardes (bakshis) du Kazakhstan. 

Mais le « vrai » concert c’est samedi à 17h00. Il reste encore quelques places paraît-il.

Alors surtout n’hésitez pas à venir découvrir ces chants étonnants venus d’un autre âge. Personnellement le chant qui me fascine le plus est le chant turkmène. Ecoutez un extrait de Tawus, la chanteuse turkmène : http://www.theatredelaville-paris.com/player/mp3player.php?current_song=3

Ecoutez aussi mon propre enregistrement d’une bakshi turkmène (élève en dernière année du conservatoire d’Ashgabad) fait dans une cuisine un soir vers minuit, dans les faubourgs d’Ashgabad : ws_30091_7.1226709860.MP3. Elle s’appelle Aybolek Mämmetgulyyewa. Excellentissime !

Au programme samedi :

Tawus chant, dotar Turkménistan
Uljan Bajbusinova, Ardak Issataeva chant, dombra Kazakhstan
Kenjegül Kubatova komuz, chant Kirghizistan
Orynbaeva Alymbaj chant, dotar Ouzbékistan

Je me contente ici de citer le texte de présentation du Théâtre de la Ville : 

« Pour ce nouveau voyage à travers l’Asie centrale, cinq femmes, aux costumes chatoyants et au caractère bien trempé, nous conduiront sur les chemins de leurs traditions musicales. Toutes partagent un même héritage : une langue d’origine türke, des ancêtres nomades et la mémoire de longues épopées contées de génération en génération au son d’un luth à long manche. Entre monde terrestre et monde céleste, elles assument aussi le rôle social et le pouvoir magique que la musique confère aux bardes. Mais, par-delà ces points communs, chacune d’elles distillera la quintessence de son pays natal. Tawus vient du Turkménistan. Sa musique tient d’un brassage d’éléments iraniens et turcs et le timbre de sa voix puissante est agrémenté de divers effets spectaculaires donnant du relief à la narration.

« Un vrai Kazakh n’est pas un kazakh, c’est une dombra » dit un proverbe. Ce n’est pas Ardak Issataeva et Uljan Bajbusinova dont les doigts de fée courent sur les deux cordes de leur dombra qui le démentiront. Ardak est connue pour sa voix d’alto qui sied à merveille aux chants lyriques dans la tradition des troubadours du XIXe siècle.

Quant à Uljan, sa voix forte et gutturale a déjà, par deux fois, surpris et conquis le public du Théâtre de la Ville. Elle est une des rares chanteuses à interpréter le répertoire épique des jyrau, autrefois réservé aux hommes, qui requiert une mémoire phénoménale et des qualités vocales exceptionnelles. Kirghize, Kenjegül, qui chante également avec l’ensemble Tengir-Too, s’est spécialisée dans les chants lyriques du bel canto. Accompagnée au komuz à trois cordes, sa voix d’une incomparable amplitude est digne des plus grandes divas.

Venue du Karakalpakistan, région désertique de l’ouest Ouzbékistan proche de la mer d’Aral, la toute jeune Orynbaeva Alymbaj quittera pour la première fois son pays où elle vient de remporter un concours national de chant. S’accompagnant au luth dotar, elle apportera toute la fraîcheur, le dynamisme et la chaleur de ses 16 ans. Jacqueline Magnier « 

France : Au secours ma yourte !

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Lu dans la Dépêche. C’est l’histoire d’un couple, apparemment paisible et habitué de l’Asie centrale, contraint de quitter la yourte où il a choisi de vivre. Cela se passe en France. Eh oui… Rien n’est simple en France. Ce serait trop facile.

La France devient le pays champion où règles et contraintes absurdes et liberticides sévissent de manière toujours plus effrayante. Chaque jour des irresponsables légifèrent. Obligation de s’y soumettre. Sinon expulsion. Sinon destruction. Sinon incarcération… Escalade véritablement inquiétante vers une d… je n’ose prononcer le mot… vers une dic…

Il y a fort à parier que le couple harcelé choisira d’aller vivre ailleurs. Au Kazakhstan par exemple. Là où ils travaillent, d’après ce qu’indique l’article de la Dépêche. Sans doute seront-ils plus libre dans cette  » dictature « . Au moins pourront-ils installer leur yourte.

Quand donc s’arrêtera ce harcèlement administratif propre à la France et qui finira bientôt par l’asphyxier ? (si ce n’est déjà fait…) ?

Lire l’article d’Emmanuel Droillard, paru ce jour dans la Dépêche :

http://www.ladepeche.fr/article/2008/10/31/485379-Arrout-Vous-avez-un-mois-pour-detruire-votre-yourte.html

Zharkent, ville ouïgoure au Kazakhstan

zharkent1.1215379084.jpgKazakhstan, 7 octobre 2007

Zharkent est la dernière ville du Kazakhstan avant la frontière chinoise. Elle est essentiellement peuplée de Ouïgours qui ont fui la Chine durant la première moitié du 20e siècle.

J’ai passé une nuit dans la petite ville de Zharkent – 35 000 habitants – avant de rejoindre Yining en Chine le lendemain.

Sur cette photo, l’unique hôtel de la ville, dont j’étais l’unique cliente.

Désoeuvrement durant une nuit un peu inquiétante…

zharkent2-bd.1215380166.jpgzharkent5.1215380253.jpg zharkent-3.1215380193.jpg

Kazakhstan – Fête nationale et passage frontière

fete-nat-kaz.1204230729.jpgAlmaty. 25 octobre 2007

Jour de fête au Kazakhstan, en souvenir de la proclamation de la souveraineté de la république survenue le 25 octobre 1990. Le Kazakhstan deviendra indépendant le 16 décembre 1991.

Deux jours plus tôt, j’étais en Chine, à Urumqi. Ce n’est que par hasard que j’ai appris la nouvelle : la frontière serait fermée cinq jours durant… Mon avion ! J’allais rater mon avion à Almaty ! Départ très précipité d’Urumqi. Atteindre la frontière kazakhe avant la fermeture. Absolument.

Urumqi – Almaty en un temps record : une journée – alors qu’il m’en avait fallu trois à l’aller ;-). Le taxi : 160 km/heure. Le chauffeur avait rit : un ami lui avait demandé s’il volait.

Presque.

La frontière enfin. Un immense embouteillage. Des bagarres. Des coups. Des engueulades. Des centaines de Kazakhes et d’Ouïgours chargés de marchandises. Tout le monde veut passer avant la fermeture.

Des minibus pleins à craquer, qui mettent des heures avant de démarrer. Je suis avec deux femmes kazakhes, la mère et la fille, qui ont fait le voyage avec moi depuis Urumqi. Je me suis installée dans l’un d’eux mais j’ai déjà envie de descendre et de parcourir le no mans land à pieds. Cinq kilomètres. Je fais part de mon intention à mes nouvelles amies. Non ! insistent-elles, du fond du minibus, on n’a pas le droit, il faut être en bus.

frontiere-kazakh.1215073907.jpgPartout j’entends : group group ! Je comprends que si je ne fais pas partie d’un groupe je serai débarquée. Quand on s’adresse à moi je dis fermement : group ! group ! Sous mes pieds, des hommes ont glissé des roues de voiture, sur ma tête des cartons passent. On nous fait resortir les passeports. Mais ils sont fous ? On ne peut plus bouger. Je suis une nouvelle fois tentée de descendre. Mes deux amies me crient de loin : don’t move ! Une vieille femme Kirghize restée sur le pavé est en colère. Elle insulte une jeune Kazakh. Celle-ci, dépitée, finit par quitter sa place. J’entends la mère de mon amie se mettre en colère. Elle crie en russe. Je ne sais pas ce qu’elle dit. Je croit qu’elle remet tout le monde à sa place. Je me redis que c’est une chance de les avoir rencontrées.

Finalement le bus démarre. Après plus d’une heure de suffocation et d’absurdité. Tant de stress… Comme c’est rare d’assister à celà ici. En général l’ambiance est toujours très zen.

Mes nouvelles amies sont bien organisées. Elles ont commandé un chauffeur qui les attend côté kazakh. Elles me proposent de partager leur voiture. Sauvée ! Je passerai la nuit à Almaty. Un Kirghize rencontré dans le minibus se joint à nous. Un  » homme d’affaires « , comme tant d’autres ici. Une halte dans une réserve ornitologique – pourquoi pas, je m’attends à tout en Asie centrale -, puis une halte, celle-ci quasiment obligatoire quand on voyage en taxi collectif dans la région, pour dîner. Je choisis un lagman, l’un de mes plats préférés.

Onze heures du soir. Almaty enfin. La nuit est tombée depuis longtemps. Des quatre quatre. Des embouteillages. Des hôtels. Complets. Très chers. Mes amies ont encore la patience de m’accompagner. Finalement je trouve une chambre dans un hôtel du centre. Nous étions parties à sept heures du matin d’Urumqi, en Chine.

frontiere-kazakh-2.1215073934.jpgLe lendemain, les cérémonies de la fête nationale. Je découvrirai Almaty, très riche, très différente des autres capitales d’Asie centrale. Almaty, ce n’est pas l’Asie centrale. On n’y croise plus de costume traditionnel. Partout, des distributeurs de cash qui acceptent sans problème les cartes visas. Oui décidément ici, cela sent l’argent. Comme on se sent loin des pays traditionnels de la région : Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan, Kirghizistan…